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Entretien avec Ian Brossat

CC : Quels sont les enjeux de la campagne des élections européennes de 2024 ? Quelles différences avec celle de 2019 ?

Tout d’abord, la guerre qui est aux portes de l’Europe. La campagne des élections européennes que nous vivons est marquée par le conflit en Ukraine. Emmanuel Macron et la majorité présidentielle tentent d’en faire un référendum pour ou contre Poutine, pour ou contre l’Ukraine. C’est absurde.
Au contraire, notre rôle dans cette campagne doit être celui de la raison, de la paix. Selon certaines sources, on approcherait des cinq cent mille morts, civils et militaires, Russes et Ukrainiens, combien en veulent-ils de plus ?
Seconde différence : la situation sociale de notre pays. Si nous pensions avoir atteint un pic avec la crise des gilets jaunes, nous avons eu depuis celle de la covid, le mouvement social sur la réforme des retraites, celui des agriculteurs, et une colère qui est maintenant présente chez un bon nombre de nos compatriotes. Beaucoup de Français ont identifié la responsabilité de l’Europe dans cette colère, notamment sur des problématiques qui les concernent, comme le prix de l’énergie.
Enfin, si ce n’est pas une différence, mais une constante qui s’est renforcée, l’extrême droite est aujourd’hui aux portes du pouvoir dans de nombreux pays européens. Et pas seulement. Dans un contexte de guerre, où les États-Unis pourraient remettre à leur tête Donald Trump, notre rôle est d’ouvrir une autre voie : ni l’extrême droite ni l’extrême centre, mais le progrès social au service de toutes et tous.

CC : Quels sont les axes forts de la campagne du PCF en 2024 ?

La France doit récupérer un bon nombre de compétences dans certains domaines. Nous ne voulons pas sortir de l’Europe, mais il faut se résoudre à la changer profondément.
Comment accepter que le prix de l’électricité soit indexé sur celui du gaz, ce qui coûte une fortune aux Français ? Comment accepter qu’on nous contraigne à la privatisation de nos barrages ? Comment accepter qu’on nous impose des traités de libre échange qui mettent en danger notre agriculture ?
Notre priorité doit être de recouvrer une forme de souveraineté sur l’ensemble de ces domaines stratégiques qui influencent directement la vie des Français.
Par ailleurs, contre les « va-t-en guerre » de droite comme de gauche, nous devons porter la paix, dans dans le droit fil de l’héritage de Jaurès. Être pour la paix, ce n’est pas être naïf. C’est savoir que, tôt ou tard, il faudra négocier. Et en général, on ne négocie pas avec ses amis. Voilà pourquoi nous défendons une solution diplomatique pour le conflit en Ukraine.

CC : Quelle est la singularité de la liste ?

Notre liste est celle des travailleurs et de la gauche unie. De nombreux représentants du monde du travail en font partie, ouvriers et employés, ainsi que des syndicalistes qui étaient en première ligne contre la réforme des retraites.
Nous sommes fiers de rassembler et de compter parmi nous des membres de L’Engagement, parti fondé par Arnaud Montebourg, mais également des personnalités comme Emmanuel Maurel, fondateur de la Gauche républicaine et socialiste (GRS).
Ensemble, nous voulons peser pour reprendre la main en Europe et en France.

CC : Comment les communistes peuvent-ils se mobiliser utilement afin d’obtenir le meilleur score possible ?

Nous sommes le premier parti de gauche en force militante. C’est en mobilisant cette force collective que nous pourrons transformer en profondeur les réalités politiques de notre époque. Dans une élection caractérisée par une forte abstention, chaque geste compte. Chacun participe à la reconquête de la gauche. La reconquête des urnes ne sera que plus facile avec ces renforts.

Ian Brossat est sénateur PCF de Paris. Il est directeur de campagne de la liste Gauche unie pour le monde du travail.

Cause commune n° 38 • mars/avril/mai 2024