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La première définition internationale du sexisme donnée par le Conseil de l’Europe est une réelle avancée comme appui pour développer le droit et des politiques de prévention dans nos pays, dans nos collectivités.

Cela fait des années que les féministes, les associations d’aide aux femmes victimes de violences, les avocates et les avocats butent sur la difficulté à bien caractériser des faits, des propos, des images, qui constituent un environnement sexiste, font partie de ce que l’on appelle « le continuum des violences » et/ou de la « culture du viol », et sont de nature à dégrader et rétrécir la place des femmes dans notre société, laissant place à des passages à l’acte d’agresseurs et légitimant l’ordre patriarcal et donc inégalitaire dans les rapports humains et les institutions.

L’état du sexisme en France
Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a sorti en début d’année un rapport édifiant sur l’état du sexisme en France (rapport du HCE sur le sexisme) et le définit comme « une idéologie qui repose, d’une part, sur le pos­tu­lat de l’infériorité des fem­mes par rapport aux hommes, et, d’autre part, c’est un ensemble de manifestations, des plus anodines en apparence aux plus graves (remarques, représentations stéréotypées, suroccupation de l’espace… jusqu’à entrave à l’avortement, viols, meurtres) ».

« Les normes européennes peuvent être utiles pour faire avancer nos combats en France, sachons saisir ces opportunités. »

Le sexisme tue, mais il est très banalisé dans notre pays. Marie Laguerre, jeune étudiante agressée dans la rue parce qu’elle n’avait pas répondu aux avances d’un inconnu, n’a pas réussi à faire caractériser son agression de sexiste bien que l’homme en question ait été reconnu coupable. Dans l’affaire Aubade, l’élue responsable de l’égalité femmes/hommes de la ville de Paris, Hélène Bidard, a eu du mal à faire comprendre le caractère sexiste d’une publicité se résumant à une paire de fesses de femme sans tête. Et dans la vie de tous les jours, difficile de contrer une blague ou une attitude sexiste sans se prendre un procès en puritanisme ou en frigidité… Les exemples ne manquent pas, et aucune autorité aujourd’hui, hormis le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) n’est en mesure d’intervenir.

Une recommandation adressée aux pays membres
Aussi, la décision du Conseil de l’Europe, de travailler à une « première définition à l’échelle internationale du sexisme » est une réelle avancée dans la prise de conscience de chacune et de chacun, mais aussi comme appui pour développer le droit et des politiques de prévention dans nos pays, dans nos
collectivités. Le texte, une recommandation adressée aux quarante-sept pays membres de l’organisation paneuropéenne, définit le sexisme comme « une manifestation des rapports de force historiquement inégaux entre femmes et hommes […] conduisant à la discrimination et empêchant la pleine émancipation des femmes dans la société » ; il incite les États à renforcer leur lutte contre le sexisme et donne des outils « d’identification et de réponse », comme une « liste complète de mesures et de situations où le sexisme s’exprime, de la publicité aux média en passant par les secteurs de l’emploi, de la justice, de l’éducation et du sport » ou encore une injonction à la communication inclusive et une alerte concernant les réseaux sociaux et le cybersexisme.
Nous ne manquerons pas de le rappeler à Marlène Schiappa et au gouvernement qui avaient fait de l’égalité femmes/ hommes la « grande cause du quinquennat », tout en lui attribuant le plus petit budget. Parfois, les normes européennes peuvent être utiles pour faire avancer nos combats en France, sachons saisir ces opportunités.l

Anne Sabourin est membre du Conseil national du PCF.

Cause commune n° 11 • mai/juin 2019