Après les élections européennes, renverser le rapport de force pour remettre l’humain au centre du développement de notre société.
Les élections européennes ont montré à nouveau que les citoyens (femmes et hommes) ne votent pas pour la gauche radicale (ci-après nommée la Gauche). À quelques exceptions près, les partis de gauche peinent à se maintenir ou s’effondrent.
Le duel libéraux-extrême droite, un jeu des plus dangereux
Malgré une abstention toujours massive, trop d’Européens ont encore voté pour l’extrême droite, qui continue de s’enraciner et de se développer, notamment à cause des politiques d’austérité commandées par les néolibéraux, majoritaires dans les instances européennes, et qui organisent et se complaisent dans ce nouveau duel avec l’extrême droite. Un jeu des plus dangereux faisant ainsi des nationalistes leurs seuls opposants. Il est devenu commun de dire que l’extrême droite augmente un peu partout. Ce n’est plus exceptionnel, cela ne semble plus catastrophique et elle est déjà au pouvoir dans plusieurs pays européens. Des partis comme les autres. Une « nouveauté » à essayer puisque le reste ne fonctionne pas. C’est maintenant une habitude. Une résignation ? Nous sommes face à une grande amnésie collective sur les dangers réels d’une telle idéologie prônant la supériorité de certains humains sur d’autres. Est-ce inévitable ? Sommes-nous condamnés à ne pas apprendre du passé, de notre histoire commune ? Allons-nous assister à la désintégration de l’Union européenne et aux replis nationalistes ?
Beaucoup d’Européennes et d’Européens ont aussi voté pour la droite la plus conservatrice. Le libéralisme gagne, encore. Leur piège du débat sur « plus ou moins d’Union européenne » ou « les modérés contre les extrêmes », brandi comme un étendard servant à faire diversion, fonctionne. Pourtant, nous devrions centrer le débat sur le problème que sont les inégalités entre les humains. L’exploitation de l’homme par l’homme se poursuit et les inégalités entre les pauvres et les riches se creusent.
Mener la bataille idéologique
Pourquoi acceptons-nous de vivre dans une société dans laquelle le bien-être de l’humain n’est pas au centre de tout ? Pourquoi acceptons-nous des conditions de travail ou de logement indignes, la concurrence entre pauvres et que la richesse produite soit confisquée par 1 % de la population ? Pourquoi acceptons-nous une société où les hommes sont payés plus que les femmes, où l’aide aux migrants fuyant leur pays, quelle qu’en soit la raison, est un crime ?
Nous ne devons pas nous résigner. Même si la méfiance envers la politique gagne du terrain, le recours au populisme n’est pas une solution qui fonctionnera sur le long terme. La gauche doit redonner confiance et espoir pour renverser le rapport de force, pour remettre l’humain au centre du développement de notre société.
Nous devons inverser ces tendances électorales en menant la bataille idéologique contre le libéralisme et l’extrême droite. Le futur de l’Union européenne ne devrait pas avoir vocation à ressembler à une société ultralibérale ubérisée, repliée sur elle-même, où flexibilité, bas salaires et intolérance règnent en maître. La répartition des richesses permettrait d’améliorer les services publics, créateurs d’emplois et réducteurs d’inégalités, d’appliquer le principe de solidarité dans toute l’économie, permettant à chacune et à chacun d’avoir une vie digne, respectant ses besoins.
Tous les espaces de débats permettant des interactions et la diffusion de ces valeurs doivent être développés et renforcés par les forces de la gauche. Celles-ci peuvent se retrouver sur les nombreuses priorités qu’elles peuvent défendre en commun et laisser les quelques divergences de côté.
Mais la politique ne doit pas être déconnectée du terrain. C’est pourquoi il est essentiel d’associer celles et ceux qui se battent au quotidien sur des thématiques précises, afin de bénéficier de cette connaissance et de ces bonnes pratiques, que ce soit au sein de syndicats, d’organisations, d’associations ou de la société civile. Quelques formats existent déjà, comme le Forum européen, initié par le Parti de la gauche européenne, dans lequel chaque participant garde son identité et ses priorités, mais travaille sur des convergences possibles. Une autre société est possible, nous devons nous battre pour elle et pour faire gagner l’espoir.
Jarod Russel est membre de la cellule du PCF de Bruxelles.
Cause commune n° 12 • juillet/août 2019