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Alors que la Suède a aujourd’hui la présidence du conseil de l’Union européenne, la gauche doit construire rapidement des réponses politiques.

L’influence néfaste de l’extrême droite et de ses politiques trouve une nouvelle manifestation dans les orientations de la présidence suédoise du conseil de l’Union européenne, qui a débuté le 1er janvier pour s’achever le 30 juin prochain. L’accord de coalition gouvernemental de la droite suédoise passé après les élections législatives de septembre dernier laisse hors du gouvernement les « Démocrates de Suède » d’extrême droite mais précise qu’une large partie du programme de ces derniers sera intégrée à la politique gouvernementale, notamment en ce qui concerne les questions migratoires, ainsi que les politiques énergétiques et européennes. C’est donc une présidence sous influence de l’extrême droite qui commence.
Le programme de la présidence suédoise met donc l’accent sur les questions de « sécurité », avec une approche honteuse des questions migratoires et la volonté de poursuivre les discussions sur le Pacte migrations-asile. La Suède est en train de rejoindre le front de la honte sur ces questions, avec notamment l’Italie, la Pologne et la Hongrie. Mais l’influence de l’extrême droite se fait sentir également sur d’autres questions, notamment écologiques, alors que le règlement européen sur les pesticides et celui sur la « restauration de la nature » devraient trouver leur achèvement. Les Démocrates de Suède cherchent à influencer les politiques environnementales dans un sens climatosceptique et anti-écologique. Leur chef, Jimmie Åkesson, est coutumier des déclarations niant la crise climatique. La présidence suédoise sera marquée, en outre, par les élections législatives finlandaises, prévues le 2 avril, pour lesquelles les sondages annoncent une nouvelle poussée du « Parti des Finlandais » ou « Vrais Finlandais ». Il faut évidemment y ajouter les développements du gouvernement Meloni en Italie.
Le projet de société de l’extrême droite n’est pas simplement réactionnaire ou l’outil médiatique des classes dirigeantes, même si ces dimensions sont bien évidemment présentes. L’extrême droite a un projet politique de rupture avec l’héritage des Lumières et une base populaire propres. Son objectif, s’il s’exprime tactiquement différemment selon les contextes nationaux, revient à refonder les sociétés européennes sur une base raciste, discriminatoire et xénophobe, en dévoyant les paniques identitaires, les désespoirs et les colères, et en étant capable de rassembler, désormais sur la longue durée, une base sociale parfois plus large que la totalité de la gauche.

La préparation des élections européennes
Ce danger pèse d’une manière existentielle sur la gauche. Il implique bien évidemment des combats à l’échelle nationale, mais également une réponse européenne, qui soit politique.
C’est un des enjeux fondamentaux de la préparation des élections européennes qui commence maintenant. Par exemple, le congrès du Parti de la Gauche Européenne (PGE), qui s’est réuni à Vienne en décembre, a posé des jalons pour ce faire et la nouvelle direction du PGE, en lien avec les partis membres, se pose comme objectif de construire des réponses communes et cohérentes. Le prochain forum européen des forces de gauche de l’automne 2023 sera important de ce point de vue.
Plus largement, toutes les luttes sociales, démocratiques, citoyennes, écologistes et féministes qui se développent en Europe sont un point d’appui majeur et indispensable car elles dessinent en creux l’exigence d’un plan d’urgence social et démocratique. Il importe donc de pousser les débats, de travailler les rapports de force dans la société et dans la gauche en vue de sa nécessaire unité sur un haut niveau politique apte à répondre d’une manière crédible aux exigences populaires et de rassembler largement une majorité sociale et une majorité politique. Ce qui s’est produit en Italie montre l’importance de la question politique. Il y a beau avoir des luttes sociales, des luttes de solidarité avec les migrants, qui sont très présentes, très importantes et qui apportent une lueur d’espoir dans un contexte d’effondrement général de la gauche, cela n’a pas empêché l’accession de l’extrême droite au pouvoir. La stratégie de conquête du pouvoir et ses outils sont à reconstruire. Il y a urgence !

Cause commune32 • janvier/février 2023