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Le communisme municipal est un laboratoire d’idées et d’innovations à l’échelle d’une commune, qui se régénère constamment dans la proximité et l’intérêt général.

Ceux qui ont cru à la « fin de l’histoire », théorisée dans les années 1990, devraient relire leurs copies. Le libéralisme triomphant et la mondialisation « heureuse », comme modèle indépassable, ont du plomb dans l’aile. La tragédie de l’épidémie actuelle, les catastrophes environnementales et les inégalités sociales indécentes (2 153 milliardaires possèdent plus de richesses que 60 % de la population mondiale) appellent de toute urgence une autre politique.

La modernité des politiques publiques portées par le communisme
Qui peut croire, à l’heure où notre pays traverse la pire crise sanitaire depuis l’après-guerre, que les politiques publiques de santé, d’éducation, de culture populaire, portées par le communisme, sont devenues archaïques ? Elles n’ont jamais été autant d’actualité. Le communisme n’est ni une utopie, encore moins une dystopie, il est un héritage et une avancée permanente, un socle de valeurs humaines et un laboratoire d’idées. Qui ne voit pas la modernité de la Sécurité sociale d’Ambroise Croizat, créée en 1945 ? En regroupant les allocations familiales, les assurances maladie et les retraites, il crée l’État social sous lequel nous vivons toujours depuis l’après-guerre, malgré les coups de boutoir du capitalisme et des intérêts privés.

« Porter un projet de société commun, être capables d’innover et d’imaginer de nouvelles solidarités, intégrer à la citoyenneté les notions de développement durable, voilà des fondations sur lesquelles s’appuyer pour redonner du souffle à une démocratie verrouillée par la technocratie et sa vision mercantile. »

Relisons le programme des Jours heureux du CNR, distribué clandestinement le 15 mars 1944, et nous y entendrons des échos qui résonnent toujours aussi vivement dans nos libertés publiques, dans le rôle protecteur de l’État ou le retour à la nation des grands moyens de production. Relisons les États généraux de Jack Ralite contre la marchandisation de la culture et pour l’affirmation d’une exception culturelle, d’une responsabilité nationale en matière de culture et de création. Cette modernité, elle vit en nous lorsque nous réaffirmons, aujourd’hui en 2020, que tout n’est pas marchand, que l’école, la santé ne sont pas à vendre, que l’investissement n’est pas un coût, que l’humain doit être le préalable à nos réflexions, actions et décisions.

Le communisme municipal
Le communisme, notamment le communisme municipal, puise sa force dans la proximité, dans sa capacité à répondre aux attentes des habitants par le prisme de l’intérêt général et par la maîtrise publique d’enjeux aussi considérables que l’éducation, la culture populaire, le logement social, le sport amateur, les droits des femmes, la santé, la sécurité. C’est également un laboratoire d’idées et d’innovations à l’échelle d’une commune. La ville de Vénissieux, dont je suis la maire depuis 2009, n’a-t-elle pas été la première ville en France à avoir mis en place un service municipal de l’enfance, en 1966 ? Bien avant la loi de 2002, nous avons également créé les conseils de quartier dès 1989 pour rapprocher les habitants des projets et prises de décision qui les concernent en premier lieu. De même, j’ai lancé en 2016 le 1er Forum de la prévention des addictions à destination de la jeunesse. Pionnier au niveau national, il a été reconnu par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les dérives addictives. De même, il y a une continuité dans la construction de notre nouvelle cuisine centrale en 2019, étape supplémentaire d’un récit commencé en 1945 par l’œuvre des cantines pour bâtir une restauration collective de qualité et publique. Ainsi, la connaissance du terrain favorise les expérimentations, toujours au service de l’humain et inscrites dans la perspective d’un communisme municipal qui se régénère constamment dans la proximité et l’intérêt général.

« Le communisme n’est ni une utopie, encore moins une dystopie, il est un héritage et une avancée permanente, un socle de valeurs humaines et un laboratoire d’idées. »

Que le levier soit urbain, social, culturel, économique, la commune doit rester inclusive, un espace de possibles, ouvert à tous et à toutes les générations, sans discrimination, sans ségrégation, sans sélection par l’argent. Défendre les acquis sociaux, porter un projet de société commun, être capables d’innover et d’imaginer de nouvelles solidarités, intégrer à la citoyenneté les notions de développement durable, voilà des fondations sur lesquelles nous pouvons nous appuyer pour faire avancer nos idées, pour redonner du souffle à une démocratie de basse intensité, verrouillée par la technocratie et sa vision mercantile, et dont nos concitoyens s’éloignent par sentiment d’abandon. Les chantiers qui sont devant nous sont gigantesques, passionnants aussi. Fort de ses valeurs et de ses combats historiques pour le progrès social, le communisme du XXIe siècle y prendra toute sa part et saura, je n’en doute pas, y jouer un rôle essentiel.

Michèle Picard est maire PCF de Vénissieux.

Cause commune n° 20 • novembre/décembre 2020