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Le PCF porte aujourd’hui un regard très attentif sur l’avenir de la planète, en lien avec ses actions pour le changement de société.

Peux-tu présenter brièvement l’état des inquiétudes qui pèsent sur l’avenir de la planète, en particulier de la vie humaine, à cause du dérèglement climatique ?
Pics de chaleur, sécheresse, événements météo extrêmes (inondations, ouragans…), montée du niveau de la mer, perte de biodiversité… voilà ce qui est en train de survenir à cause du dérèglement climatique. Cela a des conséquences aussi sur les humains pour ce qui est de la perte de récoltes, donc de nourriture, d’accès à l’eau et cela produit des réfugiés climatiques.

Les conférences internationales se succèdent (aujourd’hui la COP26), des résolutions plutôt sympathiques y sont prises, mais elles sont en général insuffisantes et peu contraignantes. Est-ce seulement de la poudre aux yeux ?
Non, même si la COP 26 n'a pas donné de résultats satisfaisants, la pression de l’opinion publique con­traint les États à prendre de vraies mesures. Par exemple, un certain nombre de pays développés sont en train d’abandonner les centrales à charbon, ce qui est une bonne nouvelle. En revanche, pour répondre à l’urgence climatique, il faudrait des mesures structurelles qui changent profondément nos sociétés dans leurs modes de production et de consommation et qui rompent avec une logique cumulative. En bref, implicitement, sortir du capitalisme. Pas étonnant que ces sommets internationaux se contentent souvent de belles paroles et d’ajustements à la marge, qui sont bien insuffisants.

Dans le petit livre vert que tu as publié avec Jacques Baudrier, on trouve des propositions concrètes assez facilement applicables. Peux-tu en commenter l’esprit ?
L’idée première est de dire qu’il est encore temps d’agir pour « sauver le climat ». L’idée seconde, c’est de porter des propositions de deux militants communistes pour nourrir le débat et l’action. En effet, on ne peut en rester aux alertes à l’urgence climatique. Il est temps d’agir, de conquérir une majorité législative de gauche et écologiste pour mettre en place des solutions immédiates et de moyen terme. Notre livre soumet ces propositions à l’opinion publique, aux militants de gauche et écologistes, avec l’idée qu’on en débatte et qu’on élabore un programme qui nous fédère.

« Des changements systémiques sont nécessaires pour réconcilier les activités humaines et la protection de la nature. »

À l’université d’été du PCF en août dernier à Aix-en-Provence, le président du Muséum national d’histoire naturelle, Bruno David, qui était invité, a insisté sur un autre aspect : le déclin de la biodiversité. Nous sommes à l’aube de la sixième extinction, mais « à l’aube », c’est-à-dire qu’on peut faire quelque chose, a-t-il ajouté. Comment la commission écologie du PCF aborde-t-elle cette question ?
Oui, il est encore temps d’agir. On peut protéger espèces et écosystèmes, on peut même parfois « réparer » les écosystèmes. On peut mettre plus d’espaces en réserves naturelles. Mais là encore, des changements systémiques sont nécessaires pour réconcilier les activités humaines et la protection de la nature. Une vision nouvelle des processus de production agricole, de l’aménagement du territoire, de l’exploitation des ressources naturelles, pour n’évoquer que ces trois aspects, est indispensable. Nous travaillons à des propositions concrètes qui se finaliseront lors des assises communistes pour l’écologie (fin janvier 2022).

Des problèmes écologiques autres que le climat et la biodiversité comportent de graves dangers, lesquels ?
Parmi les aspects qui reviennent le plus souvent dans l’actualité, il y a les pollutions (plastiques, air, pesticides). Elles ont des effets négatifs sur les écosystèmes et potentiellement sur la santé humaine. La science est en train d’explorer un domaine relativement méconnu : celui des synergies entre polluants, un cocktail de substances pouvant avoir des effets aggravants ; on pense que cela pourrait être une des causes du développement des allergies. Par principe de pragmatisme et de précaution, il convient de faire des propositions pour réduire ces pollutions.

Les outils de communication des banques et des entreprises regorgent de grandes phrases généreuses, est-ce simplement de l’écoblanchiment (greenwashing) ? Les milieux d’affaires pensent-ils qu’ils vont pouvoir faire des profits avec l’écologie ?
Soyons clairs : il y a beaucoup de greenwashing. Pour ne prendre qu’un exemple, celui d’Amazon, qui engage une (toute petite) partie de ses bénéfices pour financer des actions écologiques, alors qu’elle est une entreprise polluante. C’est l’hôpital qui se fout de la charité ! Les banques financent des « obligations vertes » qui n’en sont parfois pas, car il n’y a aucun contrôle ni cahier des charges.

« Il faut changer de système (capitaliste) et pour cela prolonger les actes individuels en démarche collective. »

En revanche, certaines entreprises, sous pression de l’opinion publique, modifient leurs processus industriels pour entrer dans des modèles productifs plus vertueux. Et d’autres exploitent commercialement les activités dépolluantes qui sont efficaces pour traiter tel problème, mais elles ne se préoccupent nullement d’en connaître la cause.

Comment articuler les mesures structurelles et les initiatives individuelles en matière de climat et d’environnement ?
L’initiative individuelle doit être encouragée. C’est un acte militant. Mais l’essentiel est de faire prendre conscience qu’elle ne suffit pas. Trier ses déchets, c’est bien, mais ce qui serait mieux, c’est de ne pas produire de déchets. Et on voit bien là qu’il faut changer de système (capitaliste) et pour cela prolonger ces actes individuels en démarche collective. C’est plus puissant, plus efficace, plus durablement trans­formateur du système.

Alain Pagano est membre du comité exécutif national du PCF, chargé de l’écologie.

 


Extrait de la table des matières
Un programme unitaire pour le climat ! Comment on peut sauver le climat si on s'y met aujourd'hui,
de Jacques Baudrier et Alain Pagano (éditions du Croquant, 2020).

Des propositions immédiatement opérationnelles

• des voitures beaucoup moins lourdes, qui roulent moins,
• beaucoup plus de trajets en métro, en bus et à vélo en zones urbaines, c'est possible très vite,
• moins d'avions, beaucoup plus de trains : on peut voyager en polluant (très) peu,
• moins de marchandises transportées, beaucoup moins de camions, plus de trains de marchandises, c'est possible et indispensable,
• aménager le territoire autrement pour arrêter l'artificialisation des terres,
• sortir la France des hypermarchés,
• l'agriculture urbaine : une solution pour demain ?
• recycler et/ou renaturer les aménagements urbains,
• multiplier par dix le budget de l'ANAH (Agence nationale de l’habitat) pour mener à terme la rénovation énergétique d’un million de logements privés par an,
• rénover énergétiquement tous les bâtiments publics et logements sociaux,
• aller vers le zéro béton dans la construction,
• ode à la bonne bouffe, climato-compatible !


Cause commune • novembre/décembre 2021