Joan Miró, L’Étoile matinale, 1940/1959. Musée national,
centre Pompidou, Paris.
Il y a un siècle, en octobre 1924, André Breton publia le Manifeste du surréalisme. Le surréalisme, auquel ne tardèrent pas à s’allier notamment Louis Aragon et Paul Éluard, avait pour volonté de dépasser le dadaïsme en organisant la contestation de la société bourgeoise avec une véritable approche révolutionnaire, à la fois littéraire, artistique mais aussi philosophique. En opposition aux contraintes de la réalité brutale, des valeurs mercantiles et consuméristes, le surréalisme appelle à l’introspection de l’esprit humain pour son émancipation et, par extension, celle des masses. Alliant la formule de Marx, « transformer le monde », à celle de Rimbaud, « changer la vie », le surréalisme ouvre la voie à un bouleversement culturel majeur.
Ainsi, pendant plus de quarante ans, le mouvement s’est amplifié et enrichi des apports d’auteurs et artistes du monde entier. Le positionnement politique des surréalistes s’est cherché tout au long de cette période, d’abord auprès des communistes avec lesquels ils partagèrent le rejet du colonialisme dès 1925. Mais les désaccords entraînèrent rapidement un éloignement avec ce courant politique, sans pour autant marquer de rupture définitive. Progressivement, des sensibilités différentes s’affirmèrent, renouant avec un esprit d’avant-garde d’influence libertaire, davantage tourné vers un aspect naturel, introspectif et sensible.
Dans Étoile matinale, Joan Miró trace une figure éclatée et éparpillée dans une composition aux contours abstraits. L’artiste catalan pose la question de la place de l’humain et de sa résilience au cœur d’un univers parfois chaotique. On peut y retrouver par analogie toutes les contradictions de l’humain dans un monde d’idées et de formes. Ou bien, la symbolique surréaliste elle-même : un mouvement protéiforme, pluriel, voire déchiré, mais dont la passion dépasse toujours les limites de notre perception dans sa capacité de création et d’interpellation.
Exposition « Surréalisme » à voir du 4 septembre 2024 au 13 janvier 2025 au Centre Pompidou, à Paris.
Axel Loscertales
Cause commune n° 41 • novembre/décembre 2024