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Militer. C’est ainsi qu’a été baptisée la nouvelle rubrique de notre revue.

Un simple verbe pour résumer deux ambitions fortes : permettre en quelques pages de relayer le travail de terrain des camarades et constituer une boîte à outils militante pour les sections qui souhaiteraient s’engager dans des batailles locales. Militer est notre quotidien ; alors partageons-le et mettons-le en commun. 

Le Parti regorge de richesses militantes, de sections qui se battent, qui réussissent, qui innovent dans leurs pratiques. Ce travail est précieux. Il est nécessaire pour le collectif que nous sommes de le mettre en valeur. Dans un premier temps, il s’agit en effet de faire connaître les luttes locales menées par les communistes ainsi que les pratiques militantes mises en place qui permettent de nous renforcer et de gagner les batailles engagées.

Dans un deuxième temps, nous aspirons à faire de cette rubrique une boîte à outils pour tous les militants. En mettant à disposition, pour un sujet donné, des argumentaires, des fiches techniques, des analyses politiques accessibles à tous, les militants de nos sections pourront ainsi être aidés dans leurs démarches. Nous tous faisons face à de nombreux défis, dans nos fédérations, dans nos sections, dans nos cellules. Rassembler dans une même rubrique les savoir-faire de tout un chacun ne peut que renforcer notre efficacité collective.

Le premier numéro sera consacré à la sauvegarde des services publics de la Poste. Quand on ferme un bureau de poste, c’est tout le maillage territorial des services publics que l’on met en danger et c’est ainsi qu’on renforce l’isolement d’un espace géographique donné et, par conséquent, de ses habitants. Quand on ferme un bureau de poste, on accepte de rendre toujours plus dépendantes les personnes à mobilité réduite. Quand on ferme un bureau de poste, on accepte que les usagers deviennent des clients, dans les supermarchés qui ont récupéré les services autrefois fournis par la Poste. Et qu’importe la confidentialité dans les démarches, et qu’importe la qualité du service !

En outre, ces fermetures de bureaux de postes s’opèrent majoritairement dans des zones où vivent les classes populaires. Les services mis à disposition y sont jugés non rentables or c’est ici plus qu’ailleurs qu’ils sont le plus utiles aux habitants.

 Donc, pour les communistes, ces batailles permettent de poser la question du service public sous l’angle du rôle qu’il joue dans la société : quel intérêt a-t-il pour la population et pour les territoires ? Et par conséquent, pourquoi insister sur sa qualité ? Les communistes ont été à la pointe des batailles sur le sujet et ont été partie prenante de la mobilisation nationale, relayée par l’appel du 16 décembre 2016 « zéro fermeture de bureaux de postes ».

 Parce que le « contrat de présence postale territoriale » sur la période 2017-2019 prévoit encore un nombre important de transferts de bureaux de postes vers d’autres « points de contacts », la sauvegarde de notre service public est plus que jamais d’actualité.

 Bon nombre de camarades et de sections vont donc être concernés dans les prochains mois et dans les prochaines années. Nous espérons que cette rubrique leur sera d’une aide précieuse dans ces combats, et tous les autres à mener. l

 

La campagne de La Poste en quelques mots

Proximité. Le service public de La Poste est fort de son maillage territorial et de la distribution de courriers et de colis six jours sur sept à l'ensemble des habitants de notre pays. Proximité est le maître-mot dans nos campagnes et nos quartiers pour la sauvegarde de l'activité postale, et il parle aux usagers qui voient leur intérêt à maintenir un service public postal complet et de qualité.

Fracture numérique. La dématérialisation des services postaux répond à des besoins de rentabilité, et à la volonté de suppression de postes. Elle accroît les inégalités dans l’accès aux services. Ceux qui ont des difficultés à lire et à écrire ont plus de peine à trouver le service recherché ou la bonne démarche à entreprendre et sont les plus vulnérables.

Tarif. Le prix du timbre au tarif lettre prioritaire est passé de 0,46 € en 2003 à 0,85 € en 2017, soit une hausse de 85% en moins de quinze ans. De son côté, le tarif Écopli est passé de 0,41 € en 2006 à 0,71 € en 2017. Pour pallier la nette diminution du volume de courrier distribué, ce sont ceux qui ont le plus recours aux lettres – souvent les personnages âgés et les classes populaires – qui sont grands perdants de cette politique tarifaire.

Tournées. Depuis vingt ans, le nombre de tournées au niveau national a quasiment été divisé par deux. Ce sont les quartiers populaires et les milieux ruraux qui souffrent le plus de cet assèchement du maillage territorial. Le rôle social du facteur est de fait réduit au strict minimum, la distribution du courrier qui est d'ailleurs plus souvent tardive, et les échanges avec les usagers sur le terrain se font de plus en plus rares.

Détérioration. La présence de La Poste dans des commerces, plutôt que par des bureaux de l'enseigne, détériore la qualité du service. Les personnels accueillant les usagers ne sont pas assermentés, sont moins bien formés, moins disponibles pour répondre à leurs attentes. La confidentialité n’est plus garantie.

Contrat. Le contrat de présence postale (entre l'État, l’AMF et La Poste) pour la période 2017-2020 vise la fermeture d'un bureau de l'enseigne sur trois surtout dans les zones urbaines. Le conseil municipal n'est plus souverain sur le maintien des bureaux de postes, ses délibérations devenant, avec ce nouveau contrat, simplement consultatives et non plus décisionnelles. Le Maire garde malgré tout la main.

Pénibilité. Les syndicats dénoncent depuis plusieurs années les conditions de travail éprouvantes dans les centres de tri et les agences postales. Cette dégradation du service public touche autant les salariés que les usagers. Plutôt qu'une réduction maintes fois répétée, c'est d'une augmentation des effectifs dans le secteur du courrier dont nous avons besoin.

 

Une stratégie nationale

C’est à la fête de l’Humanité 2016 que tout a commencé. Face à l’offensive gouvernementale menée pour démanteler le service public de la poste, les communistes n’avaient pas l’intention de rester l’arme au pied. À l’occasion d’un débat au stand de l’ANECR, plusieurs camarades, Nicolas Bonnet et François Auguste en tête, proposent de passer à la vitesse supérieure sur le sujet.

Assez rapidement, le collectif « convergence service public » est apparu comme l’outil approprié pour mener cette bataille. L’objectif était de pouvoir se coordonner à l’échelle nationale, en donnant un écho le plus large possible aux mobilisations menées localement. Pour que celles-ci soient visibles sur tout le territoire, plusieurs éléments ont été activés. Nos parlementaires ont été mis à contribution, notamment notre sénatrice Éliane Assassi qui a profité de notre possibilité d’organiser un débat au sénat pour mettre en valeur le travail des camarades et plus précisément les revendications de maintien des bureaux de postes. Par ailleurs, un travail avec l’association des Maires de France, partie prenante des négociations avec la Poste, était incontournable. À la lecture du contrat de présence postale, il était devenu évident qu’il y avait un coup à jouer de ce côté. Notre camarade Gilles Le Proust a été très actif et a permis de rejeter la première mouture du plan qui prévoyait de pouvoir contourner le maire pour faire fermer ou transformer un bureau de poste. Enfin, il faut saluer le travail des camarades qui a abouti à l’appel « Zéro fermeture » rendu public au mois de décembre. Cet appel a permis de réellement valoriser le travail mené avec les syndicats, les partis, les associations et les comités d’usagers.

En effet, c’est ce triptyque usagers – syndicats – organisation politique et leurs élus qui est le tiercé gagnant de la stratégie nationale mise en place lors de cette mobilisation. Le collectif créé lié à convergence service public est une véritable plate-forme nationale à disposition de toutes celles et tous ceux qui souhaitent se mobiliser en France. Un site internet, collectifposte. org, a même été créé ; on y trouve des éléments pédagogiques, le relais des luttes sur le territoire, etc.

À chaque fois qu’une mobilisation est lancée, tous les acteurs nationaux sont automatiquement prévenus, permettant de créer toutes les conditions pour mettre en place ce triptyque, particulièrement efficace pour obtenir gain de cause.

Une campagne particulièrement active à Paris

Si Nicolas Bonnet connaît bien le dossier, c’est qu’il a largement participé à la bataille sur la ville de Paris, là où trente bureaux de postes ont fermé ou sont en cours de fermetures. Ils sont remplacés par des supérettes qui reprennent une partie des prestations disponibles pour les usagers tout en sacrifiant la qualité et le lien social que peut représenter un bureau de poste.

Face à ses multiples fermetures, tout le monde y perds. Que ce soit la personne à mobilité réduite qui voit son bureau de poste s’éloigner, les usagers en général qui perdent en qualité de service, en confidentialité..., ainsi que les commerçants qui eux sont des usagers très réguliers des services postaux.

La mobilisation pour la sauvegarde des bureaux de poste s’est inscrit dans cette stratégie « triptyque » avec la nécessité d’impliquer usagers, salariés, élus. La pétition sur la ville de Paris a recueilli plus de 6 000 signatures.

Des signes encourageants apparaissent. Ainsi, le conseil de quartier de l’Île St Louis a invité la population à débattre et s’est prononcé par un vote contre la fermeture de leur bureau de poste. 

Des élus mobilisés

La mobilisation a également été menée dans le cadre de l'Association des Maires de France (AMF). Plusieurs élus communistes, avec Gilles Le Proust en tête (membre du bureau de l'AMF) y sont présents.

Le contrat de présence postale qui est validé par la Poste, l’État et les maires de France, prévoyait initialement la possibilité de faire fermer un bureau de poste sans la validation du maire et du conseil municipal. La bataille menée par les camarades, notamment par Gilles Le Proust, maire PCF d'Allonnes, a permis de faire rejeter par le bureau de l'AMF cette première mouture. La direction de la Poste a été contrainte de revoir sa copie. Certes, le conseil municipal peut être contourné mais pas le maire. Ceci est un véritable point d'appui pour les futures luttes de sauvegarde du service public postal sur tout le territoire.

Les élus communistes ont été des acteurs incontournables de cette victoire singulière. Ils n'ont pas été seuls et de nombreux maires se montrent de plus en plus attachés au bureau de poste de leur commune. Cette victoire fait écho au travail des camarades de l'Isère qui, trois ans auparavant, avaient mobilisé largement les élus locaux, bien au delà des communistes, pour affirmer l'attachement des communes à leurs bureaux de postes.

 

La section de Massy mobilisée pour la sauvegarde de son bureau de Poste

La section de Massy du PCF a mené une mobilisation victorieuse en 2015. En effet, Massy, ville de l’Essonne de 50 000 habitants, compte trois bureaux de postes dont un se situe dans le quartier de la Villaine, quartier populaire de la ville.

Tout est parti du jour où les militants de la cellule du quartier ont découvert qu’un bureau de poste devait fermer pendant la période estivale. Les liens entretenus avec les camarades de la FAPT CGT 91 (fédération des postes) ont permis de confirmer la nouvelle. 

Le Maire UDI, Vincent Delahaye, avait en réalité l’ambition d’ouvrir un bureau de poste dans un nouveau quartier aisé de Massy, l’Atlantis, véritable vitrine de la ville. Siégeant à la commission départementale sur l’implantation de la poste, il avait son plan en tête : fermer le bureau de poste dans le quartier populaire de Villaine pour pouvoir l’ouvrir dans ce nouveau quartier.

La section a alors réagi : une mobilisation s’est engagée aussi bien sur le terrain qu’au niveau institutionnel. La cellule communiste du quartier a elle aussi rapidement pris le relais, comme le permet cette structure de proximité de notre parti. Les camarades ont fait signer une pétition à plusieurs centaines de personnes en associant les habitants du quartier à l’action de la cellule. Une délégation avec les habitants et les camarades a été reçue par le receveur de la Poste, sans réponses réelles apportées à l’issue de la rencontre.

Conjointement, la conseillère municipale du Parti, Colette Jan, a été d’une grande aide. Elle a relayé cette bataille au conseil municipal par l’intermédiaire d’une motion ainsi que dans le bulletin d’information du conseil municipal.

Après des mois de batailles, les camarades ont obtenu gain de cause et le bureau de poste a été maintenu dans le quartier. Les camarades restent toutefois vigilants, ayant conscience que cette victoire pourrait être remise en cause. Ils ont en tête que la volonté de la poste est de fermer nombre de bureaux en milieux urbains.

Cette mobilisation est riche en enseignement. Elle montre que la clef du succès est une implication de la population, implication que permet facilement la structuration en cellules. Elle montre également la nécessaire articulation avec le travail des élus en conseil municipal, véritable atout dans la popularisation de la lutte. Elle montre enfin que cette bataille se mène conjointement avec les acteurs sociaux tels que la CGT, partenaires privilégiés du parti.

Nous remercions les camarades de la section de Massy du PCF, de leur secrétaire Thierry Doulaud, leur conseillère municipale Collette Jan et leur cellule de Villaine. 

 


 

Fiche Méthode d'organisation 

S'il est souvent tentant de se lancer bille en tête dans l'action, c'est bien plus efficace de prendre un temps pour se poser et planifier les différentes phases de notre action.

C’est au collectif d'animation de la section/cellule de faire ce travail de préparation : l'animateur seul risque de passer à côté de certains aspects, et une assemblée générale sera trop large pour permettre un travail pratique efficace. Ce temps en amont est la garantie d'une meilleure efficacité, l'objectif de cette fiche sera de vous donner les clés pour réussir cela.

Conduire une campagne de défense de la Poste

 Évaluer la situation.

Poser clairement la nature du bouleversement que l’on va combattre (fermeture d’un ou plusieurs bureaux, restrictions d’horaires, fermeture de services…).

Récupérer la communication officielle accompagnant la décision. Si elle n’est pas disponible directement, on peut contacter l’institution (la Poste ou la commune) à titre individuel, car ils répondent plus facilement à un usager isolé. Obtenir la communication officielle permet d’analyser leurs arguments pour mieux construire notre discours afin de les contrer.

Regarder le contexte : attaque isolée ou partie prenante d’un plan plus global, type d’agence (100 % la Poste ou agence communale), conséquences sur les usagers (bureau restant le plus proche, quartiers ou villages concernés…). Cela permet d’affiner nos arguments de mobilisation en les rendant concrets.

Identifier les acteurs susceptibles de mener la bataille avec nous : syndicats de salariés, associations de quartiers, élus locaux… Les solliciter pour les rencontrer.

Concernant les élus locaux, associations de quartier et forces politiques : dans la mesure où il faudra élargir le plus possible le rassemblement autour de nos revendications, il faut parfois faire attention à l’inclusion dès le départ d’autres acteurs, spécialement lorsqu’ils sont de formations politiques rivales. En effet, il est important de bien faire apparaître que l’initiative est prise par le Parti, ses élus et/ou ses alliés, et de ne pas se « noyer » d’emblée dans un collectif unitaire trop large si d’autres personnalités ou organisations politiques moins bien intentionnées que nous, risquent de tirer la couverture à elles.

Préparer la campagne.

Lancer une pétition en format papier et en ligne (sur Change.org - générer un flashcode pour les tracts et affichettes sur www.flashcode.fr ou un site similaire).

Rédiger et mettre en forme un tract d’information (court et percutant, avec si possible deux niveaux de lecture : les arguments clés du combat, et un encart « pour aller plus loin » avec les positions plus générales du Parti sur le sujet).

Construire un planning de campagne articulant différentes actions :

- Points fixes devant le bureau concerné et dans les lieux passants alentour ;

- Porte-à-porte dans le quartier concerné ;

- Visite des commerçants du quartier pour les sensibiliser et leur proposer de mettre la pétition à disposition de leurs clients, de poser une affichette dans leur local, etc.

Un bon plan de campagne n’est pas le plus chargé en actions, c’est le plus adapté aux forces dont dispose la section/cellule.

La Pétition, pivot de la mobilisation.

La pétition est l’outil central d’une mobilisation. Elle permet de rester en contact avec les signataires, de les solliciter pour les actions, elle doit donc toujours comprendre les champs « mail » et « téléphone ».

Passer à l’action.

Se donner 3 semaines environs pour faire signer la pétition, puis organiser une conférence de presse pour communiquer sur le nombre de signatures et appeler à un rassemblement devant le bureau de poste, en se donnant 2 semaines de plus pour diffuser l’information (tout en continuant à faire signer la pétition).

Pour réussir le rassemblement, utiliser les coordonnées récoltées avec la pétition : les signataires ont déjà fait un premier « acte », ils ont plus de probabilité de se mobiliser. Pour cela, le premier moyen utilisable est le mail, mais il est bon de le doubler d’envoi de SMS. Le rappel téléphonique oral nécessite plus d’organisation (temps, téléphones avec forfait adapté, accompagnement des camarades…), mais reste le moyen le plus mobilisateur.

Mettre en avant les personnalités communistes du territoire.

Sans tomber dans la personnalisation à outrance, il est important de mettre en valeur une ou deux personnalités communistes du territoire (élus locaux, responsables du Parti…) dans la campagne. L’objectif est que les habitants puissent mettre des visages sur ce combat, augmentant notre rayonnement dans la population.

Permettre la négociation.

À l’issue de cette première phase de mobilisation, il est important de déboucher sur une négociation avec les institutions compétentes. Il faut donc solliciter un rendez-vous, en incluant dans notre délégation l’ensemble des acteurs (élus locaux, associations, syndicats de salariés) ainsi que des citoyens mobilisés.

Une négociation se prépare collectivement, en amont. Il faut savoir identifier clairement nos revendications et les marges de manœuvre, pour mener la discussion de sorte à obtenir des avancées pour les citoyens.

La moindre avancée, même partielle, doit être ensuite mise en avant comme une preuve que la lutte paye, quitte à relancer un cycle de mobilisation pour continuer à faire monter la pression sur les décideurs et obtenir d’autres avancées. Pour amplifier la mobilisation, il sera impératif d’élargir le cercle des personnes impliquées dans les actions militantes, en sollicitant les citoyens les plus mobilisés.

Il est toutefois important, dans la mesure du possible, qu’une mobilisation ne se termine pas par une retombée démoralisante. Il est primordial d’anticiper les contraintes de calendrier (vacances scolaires notamment), et de bien ajuster la communication du Parti. Proposer l’adhésion durant la mobilisation à tous ceux qui se seront engagés avec nous est également un réflexe à avoir, pour leur permettre de prolonger le combat sur la durée.