décliner une campagne européenne de long terme
Editorial
Mener une campagne, dresser un plan de développement sur plusieurs mois, définir des objectifs auxquels greffer des actions, proposer des matériels adaptés dans la durée, construire pour convaincre et faire adhérer… Sur le papier, s’organiser peut paraître simple, dans la réalité, c’est souvent plus difficile.
S’est enclenchée au PCF dans le dernier semestre 2020 la campagne « Pas de profit sur la pandémie ». Ce dossier se propose de revenir dessus : quelle construction, quels échanges, quelles leçons tirer de cette mise en dynamique commune, quels allers-retours entre théorie et mise en pratique ?
« Pour un vaccin, bien commun de l’humanité. »
Nous avons jusqu’au 30 novembre 2021 pour recueillir le maximum de signatures sur la pétition européenne : il s’agit de l’un des objectifs de cette campagne, le deuxième étant de travailler au renforcement du parti sur une campagne de long terme, permettant de mobiliser sur un sujet d’actualité, en renforçant notamment nos liens avec le secteur de la santé, et en commençant des initiatives nationales relayées dans les fédérations et l’appel par la commission Éducation, ou la mobilisation autour de l’énergie.
Penser nos campagnes en articulant ce que nous voulons obtenir, ici le vaccin comme bien commun, et veiller à la construction de notre organisation pour porter plus globalement nos propositions, mettre en place des initiatives, faire des adhésions ; nous devons marcher constamment sur nos deux jambes afin de toujours mêler idées théoriques et idées pratiques. C’est sur cette volonté que s’est construite la campagne « Pas de profit sur la pandémie » en France.
Delphine Miquel
Le site de la campagne : https://noprofitonpandemic.eu/fr/
Un collectif de travail en lien avec les fédérations
Une fois la campagne lancée au niveau européen, il nous fallait la décliner localement dans nos fédérations. Pour cela un collectif s’est constitué au niveau national et se réunit régulièrement depuis, afin de suivre les avancées de la campagne, proposer une orientation politique, du matériel et des initiatives.
Dans ce collectif : des camarades faisant le lien au niveau européen, la commission santé, la communication et l’organisation nationale, mais aussi une graphiste qui suit la campagne.
La question de la mobilisation des fédérations était essentielle : il est rare qu’une campagne prenne d’un coup, et une impulsion nationale sans ancrage local ne peut aboutir. Aussi, rapidement, le collectif a proposé des points réguliers d’échange avec les fédérations. Plusieurs réunions en visio se sont déjà déroulées, auxquelles ont participé une cinquantaine de fédérations.
L’expérience s’est révélée intéressante : si des secrétaires départementaux étaient présents, d’autres avaient fait le choix d’envoyer une ou un représentant de leur fédération : membre de la commission santé locale, responsable communication, responsable à l’organisation, responsable de section s’étant emparé de la campagne ; c’est donc dans la diversité de nos fonctionnements que nous avons pu échanger sur les premières pratiques mises en place, poser des questions, apporter des remarques améliorant le matériel et faire des retours de terrain, penser la campagne sur le temps long, notamment à l’occasion de dates nationales autour desquelles s’est focalisée l’activité et qui a permis à la campagne d’être plus visible et accessible aux camarades, qui s’en emparent de plus en plus.
Animer la campagne dans les fédérations et les sections
Faire le lien avec les autres organisations pour amplifier la mobilisation :
- Contacter les organisations locales proches (CGT, SUD…), les comités de défense de l’hôpital, afin de leur proposer de créer un collectif local d’animation de la campagne et d’y participer.
- Contacter les associations, organisations de santé locales, afin de les informer de la démarche.
Informer et former les adhérentes et adhérents :
- Envoyer les tracts et argumentaires aux sections, aux adhérentes et adhérents pour qu’ils puissent se documenter sur la campagne, organiser des sessions de formation.
S’organiser :
- Prévoir des points de distribution devant les laboratoires, les pharmacies, les centres de santé, les lieux de test et de vaccination, les points habituels (marché…), les EHPAD, les entreprises de médicaments (Sanofi…), des permanences d’élus…
- Contacter vos élues et élus locaux afin qu’ils axent leur communication sur l’accessibilité au vaccin en reprenant les mots d’ordre, leurs actions en lien avec la santé.
Communiquer :
- Annoncer vos actions sur les réseaux, à vos adhérentes, adhérents/contacts, aux autres organisations signataires et/ou participantes…
- Prévenir la presse de nos actions.
- Prévoir des affichettes pour mettre dans des salles d’attente de médecin si vous avez l’accord, sur des panneaux libres, des halls de lieux publics où c’est possible...
Cette campagne peut permettre d’accentuer sur un combat local lié à la santé, à l’emploi dans les hôpitaux, en lien avec une lutte locale…
D’autres actions…
- Proposer à chacun de faire signer au moins cinq personnes de son entourage.
- Lancer un débat en visio ou des discussions autour de la thématique du vaccin, des grands groupes pharmaceutiques, des brevets, de la Sécurité sociale… Des formations ont déjà eu lieu, les membres du collectif sont à votre disposition pour en faire dans les fédérations et sections.
Ces initiatives permettent d’appréhender différemment la campagne, pour celles et ceux qui sont peu à l’aise sur le terrain, d’apprendre, d’enrichir avec ses propres idées et réflexions. Varier les activités permet au plus grand nombre de se reconnaître dans une campagne et d’y participer !
Loire-atlantique (44)
Le dessin comme outil politique
Par Frédérique Garcia-Sanchez
Dessiner pour une campagne politique, c’est d’abord s’approprier l’orientation générale de la campagne, les principaux thèmes qui lui donnent une cohérence globale avec son lot de mots d’ordre et de slogans et parvenir par l’image à marquer les esprits et provoquer l’adhésion. L’affiche, le logo, l’imagerie, toute la symbolique créée avec le souci de la cohérence politique doit à la fois informer sur la campagne et ses propositions réelles (littérature de campagne, slogans, mots d’ordre) et en même temps bousculer l’imaginaire des observateurs pour les emmener, si ce n’est à la réflexion, a minima à chercher les réponses aux questions que les images suscitent chez eux.
L’image doit être simple, forte et pourquoi pas choc et être le vecteur d’un message politique souvent complexe lorsqu’on le développe par exemple dans un format tribunitien (réunion publique, meeting, formation, etc.).
« Une image simple, forte et pourquoi pas choc, vecteur d’un message politique souvent complexe. »
Pour la campagne #pasdeprofitsurlapandémie l’image caricaturale du banquier ventripotent affublé d’un chapeau haut de forme, d’un élégant costume, d’une canne et d’un cigare représentant la voracité du capital et la ploutocratie dirigeante est explicite mais pas suffisante. Pour faire le lien avec la pandémie et la mainmise du capital sur les vaccins, il porte une veste qui représente le virus. Ainsi on peut comprendre que le personnage symbolise à la fois la domination du capital et du profit et que les vaccins pour lutter contre le virus ne sont que des moyens parmi d’autres de s’enrichir comme avec n’importe quelle marchandise au mépris de la santé humaine.
Dessiner pour une campagne politique est un acte militant, à mon sens. Cela permet de véhiculer nos idées, de transmettre notre vision du monde, c’est l’expression d’une voix politique engagée qui peut être visible par toutes et tous en s’insérant dans l’espace public.
Le graphisme politique doit conduire à l’action et parfois malgré lui il peut rentrer dans le domaine de l’art qui par essence ne diffuse pas de message politique sauf peut-être, comme le disait Deleuze, « lorsqu’il fait acte de résistance ».
Frédérique Garcia-Sanchez, graphiste.
Nancy (54)
Élaboration collective d’une action publique
Par Victor Durieux
Concilier notre représentation médiatique et politique, notre activité militante et notre dynamique collective est au cœur de la réflexion de notre section. Ainsi, alors que nous sommes sur de nombreux fronts au quotidien, comment imprimer une dynamique avec des temps forts à notre collectif militant et comment être une force capable de faire émerger des fronts de lutte et des propositions ?
Ces questions se sont posées lors de notre dernière conférence de section et ont trouvé une partie de leurs réponses dans la mise en place de temps d’élaboration collective pour des actions qui gagnent en visibilité.
C’est ainsi que nos retrouvailles conviviales de début d’année ont été l’occasion d’un brainstorming dont l’objet était de construire ensemble de A à Z une action d’envergure. Nous en avons profité pour remettre officiellement leur carte à trois nouveaux membres.
Tout était donc à définir, thème et enjeu, accroche symbolique de l’action, supports de communication, etc. Une mise en branle collective destinée à la fois à mobiliser en interne et à marquer l’opinion publique. Le sujet s’est porté sur la question de l’accès pour tous aux vaccins, accès empêché par la propriété privée des brevets. L’occasion pour nous de nous inscrire dans la campagne nationale « Pas de profit sur la pandémie » et de nous approprier le matériel et les argumentaires existants. Quand l’un des nôtres a proposé que nous nous retrouvions munis d’une banderole devant un centre de vaccination à Nancy pour effectuer une intervention, nous n’imaginions pas que celui-ci serait à l’arrêt faute de sérum.
Le samedi suivant, pour tous les passants, notre banderole et notre présence en nombre donnaient à voir une volonté politique forte et faisaient passer un message contrant à la fois les politiques libérales, la résignation et le populisme. Un article est paru le jour même dans la presse et le lendemain nous avons publié sur les réseaux sociaux la vidéo de notre intervention.
À l’heure où les conséquences de la crise sanitaire révèlent aux yeux de tous l’incapacité des gouvernements libéraux à répondre aux besoins les plus élémentaires, nul doute que nous aurons à prolonger notre intervention sur le sujet en élaborant de nouveaux temps forts.
Installer résolument nos propositions dans l’opinion publique est une nécessité pour dégager de nouveaux horizons, rompant avec les logiques qui tiennent nos concitoyens dans l’angoisse, les confrontent au risque sanitaire et les conduisent à la pauvreté.
Victor Durieux est membre du bureau de section du Grand Nancy.
Du matériel… pensé pour une campagne de long terme
Des phases de la campagne ont été définies qui ont chacune amené à des tracts et des visuels :
https://www.pcf.fr/materiels
- Novembre : présentation générale de la campagne « Pas de profit sur la pandémie ! » ;
- Décembre/janvier : sur la question de la transparence « Ne laissons pas notre santé dans les mains de Big-Pharma » ;
- Février : faire du vaccin un bien commun ;
- Fin février : gratuité et accessibilité des traitements et vaccins à prix coûtant avec le slogan « Stop au hold-up de la Sécu ! » ;
- Mars/avril : journée européenne de mobilisation le 11 mars.
- Assises du médicament avec le slogan « Pas de fonds public sans contrôle public ».
La suite est à définir, en fonction de l’avancée des signatures, de l’évolution de la pandémie et des décisions gouvernementales. L’ensemble du matériel est décliné sur le site de partage du parti, il comprend des argumentaires et des notes, des exemples de lettres, des tracts et des visuels. Une adresse mail est destinée à recueillir les questions, les partages de tracts, de matériels… La commission Santé est également mobilisée afin de répondre aux questions.
Espace de partage :
https://partage.pcf.fr/index.php/s/ NKFHo9tKYGKMszP
Adresse mail :
[email protected]
Contact commission santé :
[email protected]
Entre terrain et réseaux
Les circonstances l’obligent, si nos actions militantes de terrain sont maintenues là où c’est possible, nous avons aussi développé du matériel de communication spécifique aux réseaux sociaux, comme un cache Facebook, le hashtag #Pasdeprofitsurlapandemie, plusieurs visuels reprenant les slogans, le lien et le QR code menant vers la pétition… Plusieurs sections et fédérations se sont emparées de ces matériels et les ont adaptés aux problématiques locales.
On peut signer en ligne… mais aussi sur papier. Faire du lien, ce n’est pas toujours simple, surtout quand on renvoie sur un lien en ligne alors qu’on est entre deux étals de marché… On peut toujours faire remplir le formulaire du ministère à renvoyer ou une pétition reprenant bien les informations nécessaires, qu’il faudra saisir par la suite. En respectant le règlement général sur la protection des données (RGPD), vous pouvez recueillir des coordonnées de contacts et ainsi développer votre organisation.
L’adresse pour renvoyer le formulaire afin que les signatures soient prises en compte :
Comité français pour la pétition ICE
BP 50008 91940 Les Ulis Courtabœuf
Argumentaire
Sur les marchés, en distribution, face aux passantes et passants, que dire ? que répondre ?
Par Charlotte Balavoine
Rappel de la campagne.
Nous demandons que les firmes pharmaceutiques ne fassent pas de profit sur la production du vaccin, comme c’est le cas actuellement. Les brevets déposés sur les vaccins empêchent sa production à grande échelle et donc son accessibilité. De plus, les contrats passés entre l’Union européenne et les firmes concernant les coûts sont extravagants, alors que la recherche du vaccin a été largement payée par les États et l’Union européenne : le vaccin doit donc être un bien public, accessible par tous et toutes. Et en France nous ne pouvons pas accepter que la Sécurité sociale, qui doit déjà supporter les coûts des tests, prenne aussi en charge le coût du vaccin et donc verse toujours plus d’argent aux grandes firmes dépositaires du brevet. Nous invitons donc à faire signer l’initiative citoyenne européenne (ICE).
Qu’est-ce qu’une Initiative citoyenne européenne ?
C’est un outil qui nous permet d’exiger un changement législatif à la commission européenne. Il faut 1 million de signatures, en un an, dans au moins sept États membres, pour que les institutions européennes soient obligées de prendre en compte notre demande.
Avec cette campagne, vous voulez obliger les gens à se vacciner ?
Nous demandons que les vaccins et les traitements soient accessibles à toutes et tous, indépendamment de la situation sociale ou de la nationalité. Chacun doit être libre de se faire vacciner ou non. Ce qui est insupportable, c’est que ceux et celles qui voudraient l’être ne le peuvent pas.
Peut-on faire confiance à l’industrie pharmaceutique ?
Nous demandons la transparence la plus totale sur les contrats conclus avec les entreprises pharmaceutiques : aujourd’hui ils sont tenus secrets sur le montant comme sur le contenu des contrats. C’est ce que nous voulons changer avec cette campagne. D’où notre exigence de création d’un pôle public du médicament en France, en Europe, dans le monde.
On nous dit que le vaccin sera gratuit mais qui va payer ?
Oui, le vaccin a un coût, et il sera payé par la Sécurité sociale. Le montant de chaque dose du Pfizer serait de 16,50 euros en Europe, mais là encore c’est le flou le plus total. C’est pour cela que nous réclamons que le vaccin soit vendu à prix coûtant : pour ne pas faire de hold-up sur la Sécu ! Par ailleurs, la recherche et les capacités de production ont déjà été payées avec l’argent public, c’est totalement aberrant de vouloir nous faire payer une troisième fois pour engraisser Big-Pharma !
Pourquoi il y a autant de vaccins sur le marché ?
Parce que les pouvoirs publics ne se sont pas mis d’accord pour produire ensemble un vaccin universel et gratuit. Les salariés et la CGT Sanofi réclament par exemple que leur entreprise, qui n’arrive pas à produire son propre vaccin, puisse aider à la production des autres vaccins afin de répondre à la demande. Il faut soutenir cette initiative et au-delà remettre en cause le système de brevets de façon générale.
Charlotte Balavoine est responsable PCF de la campagne « Le vaccin, bien commun de l’humanité ».
Cause commune n° 22 • mars/avril 2021