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Les conséquences économiques de la crise financière de 2008 puis de la crise des dettes souveraines européennes à partir de 2010 sont connues. La plus visible et la plus commentée a sans aucun doute été l’augmentation importante du chômage et son maintien à un niveau élevé pendant près de dix ans.

Evolution du niveau de vie (en euros constants) et du PIB par unité de consommation entre 1996 et 2018STATS-24.jpg

Source : INSEE, Comptes nationaux et enquêtes. Revenus fiscaux et sociaux.

à l’occasion de la publication de son ouvrage sur les revenus et le patrimoine des ménages, l’INSEE propose une perspective de long terme sur l’évolution du niveau de vie des Français, qui met en évidence une conséquence moins discutée de ces crises successives : une stagnation globale du niveau de vie depuis 2008. Le niveau de vie médian en 2018 n’est ainsi supérieur que de 1% à celui de 2008 et il est resté globalement stable sur l’ensemble de la période.
Ce constat vaut également pour le niveau de vie des 10 % de Français les plus riches, qui a un peu mieux résisté en 2008 mais a sensiblement ralenti entre 2011 et 2014, et est quasiment identique en 2018 à son niveau de 2008. En revanche, pour les 10 % de Français les moins riches, il y a eu une perte importante de niveau de vie au moment de la crise de 2008, rattrapée en partie seulement depuis, et le premier décile de niveau de vie reste inférieur de 3 % en 2018 par rapport à son niveau de 2008. C’est l’autre grand effet de cette crise : un accroissement notable des inégalités, surtout jusqu’en 2013. En 2018, sous l’effet des premières politiques fiscales du gouvernement d’Emmanuel Macron, ces inégalités repartent d’ailleurs notablement à la hausse, avec une baisse marquée du niveau de vie des plus pauvres (voir Cause commune n°20, « En attendant le ruissellement », pour plus de détails).
Quoiqu’il en soit, la période d’après 2008 marque un changement de régime notable : auparavant, et malgré les effets de cycle (visibles notamment autour de l’éclatement de la bulle internet), le niveau de vie connaissait un rythme de croissance important, de plus de 1,5 % par an en moyenne. Cette période est donc désormais terminée, et le régime de grande stagnation qui lui a succédé pendant maintenant plus de dix ans, couplé à un accroissement visible des inégalités, est peut-être une des causes des explosions sociales que l’on a pu voir à partir de la fin de l’année 2018.

Cause commune n° 24 • juillet/août 2021