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Pour cette première chronique européenne, j’ai longuement hésité : par quoi commencer ? Projet de notre nouveau Président, rendez-vous de lutte avec la manifestation du 28 septembre à Bruxelles pour le droit à l’avortement par exemple, passage en revue des derniers votes à Strasbourg, focus sur un pays à l’actu brûlante… Promis, il y aura de tout ça dans les prochains billets. Peut-être aussi des infos insolites, la parole donnée à des chroniqueurs talentueux, femmes et hommes de France et d’ailleurs, des coups de gueule et des coups de cœur.

Mais puisque La Revue du projet devient Cause commune et parce que son premier dossier porte sur la lutte des classes, je partage ici une conviction : l’enjeu européen, en cette fin de début de siècle, est le passage à l’offensive du grand nombre, les 99 % de tous les pays pour reprendre le pouvoir sur l’avenir d’un continent qui finira mal s’il est abandonné à la finance et à ceux qui la servent.

L’Union européenne est une belle réussite du capital au XXe siècle, tant il s’agit d’un modèle avancé de construction façonné par et pour les 1 %. L’évasion fiscale y est légale. Le droit du travail, entrave à la croissance des profits est régulièrement décapé. Les banques naviguent allègrement entre spéculation et refinancement gratis par la BCE, leurs crises sont jugulées par les États et il n’y a plus aucun complexe à user de la violence face à la contestation, fut-elle d’un gouvernement. Et bientôt, les multinationales pourront, grâce aux accords de libre-échange, traîner nos pays devant les tribunaux pour faire sauter les régulations sociales ou environnementales qui les gênent. À part quelques rappels à l’ordre symboliques par la Commission quand les dérapages sont trop visibles, Bruxelles est une fête pour le business.

Pourtant, un projet de construction régionale alternative, respectant les souverainetés populaires, se dotant d’outils de développement commun, de droits sociaux avancés et d’une politique de paix mondiale existe dans ses grandes lignes. Et objectivement, la force de ceux qui ont intérêt au changement est là. Comment la dévoiler, l’organiser, la politiser ? La grande question de l’unité des travailleurs et classes populaires européens se pose comme jamais ! Cinquante ans après le traité de Rome, 25 ans après celui de Maastricht, la concurrence entre travailleurs a bien infusé. Le tout marchand et maintenant « l’uberisation » nous renvoient chaque jour un peu plus vers la débrouille individuelle. Le rejet et la colère sont là. La peur est toujours aussi mauvaise conseillère. La Grèce a prouvé que même en frappant fort avec un référendum, pas un homme, pas un parti, pas un peuple ne peut seul changer la donne.

L’histoire s’accélère, le remodelage de nos sociétés est en cours, il faut d’urgence nous mettre en action. Les forces progressistes dans leur diversité, gauche politique, écologistes, monde syndical et ONG, intellectuels, artistes engagés ne doivent plus tarder à envoyer le signal positif de l’unité et des batailles communes. Marseille accueillera les 10 et 11 novembre prochains un forum européen progressiste, on en reparlera !  l

 

*Anne Sabourin est membre du Comité exécutif national du PCF, chargée des question européennes.